- ACTION CATHOLIQUE
- ACTION CATHOLIQUEACTION CATHOLIQUETrop multiforme et trop étendue pour constituer une véritable organisation, l’Action catholique est plutôt un ensemble de mouvements obéissant à une sorte d’idée-force ou de loi-cadre qui consiste, dans l’Église contemporaine, à faire participer les laïcs à l’apostolat dont le pape et les évêques sont les premiers responsables. Les mouvements très variés qui ont tenté de mettre en œuvre ce dessein se sont développés principalement sous le pontificat de Pie XI. Leur importance grandissante dans la vie de l’Église catholique n’a pas été sans influencer la préparation du second concile du Vatican. Le plus ancien de ces mouvements, la Jeunesse ouvrière chrétienne (J.O.C.), a été dans beaucoup de pays considéré comme la plus grande réussite de cette formule. Née en Belgique, en 1924, sous l’impulsion de l’abbé Cardijn, la J.O.C. s’est proposé de «faire des ouvriers les apôtres des ouvriers» et de travailler à ramener au Christ moins des individus que des «masses» entières. Elle s’implanta en France en 1926 avec l’abbé Guérin et quelques ouvriers d’une paroisse de Clichy (banlieue parisienne). Sur le modèle de la J.O.C. surgirent ensuite d’autres mouvements: la Jeunesse agricole chrétienne (J.A.C.), étudiante (J.E.C.) ou indépendante (J.I.C.). Les mouvements de l’Action catholique des adultes furent créés plus tardivement. Ils sont souvent issus des mouvements de jeunesse catholiques. C’est ainsi qu’est née de la J.O.C., en France, la Ligue ouvrière chrétienne (L.O.C.), qui connut bien des vicissitudes à l’issue de la Seconde Guerre mondiale avec les dissidences du Mouvement populaire des familles (M.P.F.) et du Mouvement de libération ouvrière (M.L.O.), pour ensuite se stabiliser dans le cadre de l’Action catholique ouvrière (A.C.O.).Les mouvements spécifiques d’action catholique relèvent de deux types: l’Action catholique générale, qui mêle les différents milieux sociaux (tels l’A.C.G.F. pour les femmes, Vivre ensemble l’Évangile aujourd’hui, Partage et Rencontre), et l’Action catholique spécialisée, qui s’organise en fonction de l’âge et du milieu socioprofessionnel (tels l’Action catholique des enfants, l’Action catholique des milieux indépendants, Chrétiens dans le monde rural). Suivant les pays, c’est l’un ou l’autre de ces deux types qui prédomine.La notion d’action catholique, avec tout ce qu’elle implique d’ambiguïté (non seulement en raison de sa double visée, spirituelle et temporelle, mais aussi par le caractère nouveau des rapports qu’elle établit entre la hiérarchie et le laïcat), a été maintes fois mise à l’épreuve. Les crises surgies à ce sujet en France, notamment celle de l’A.C.J.F. (1956), puis celle de la J.E.C. (1965), sont parmi les plus éclairantes. Fondée en 1886 «pour coordonner les forces vives de la jeunesse catholique» et composée alors de jeunes gens de la bourgeoisie et de l’aristocratie, l’Association catholique de la jeunesse française (A.C.J.F.) était devenue entre les deux guerres, sous l’impulsion des mouvements spécialisés de la jeunesse d’action catholique, un organisme au sein duquel ces derniers se proposaient de mettre au point leur pédagogie de l’action, d’élaborer une théologie du laïcat et de se rendre mutuellement attentifs à la complexité de la société contemporaine. Cette évolution, qui avait même amené la vieille A.C.J.F. à se donner à plusieurs reprises comme présidents des ouvriers et des paysans, correspondait à la vocation initiale de l’association, qui reposait sur deux principes: l’impossibilité pour le chrétien de vivre son christianisme sans prendre une vision exacte de la situation du monde; le refus de toute prétention à découvrir, pour les différents problèmes temporels, «une solution chrétienne» qui ferait l’unanimité. L’A.C.J.F. avait choisi d’être un mouvement dans l’Église, non un mouvement d’Église.La crise devait naître d’un affrontement en son sein, affrontement entre ses composantes majeures, la J.O.C. d’une part, la J.E.C. et la J.A.C. d’autre part. La première, minoritaire parmi les jeunes ouvriers, compensait la crainte qu’elle avait du marxisme en empruntant à ce dernier son idéal messianique, qu’elle magnifiait dans une sorte d’«ouvriérisme apostolique» et au profit de ce qu’elle appelait le «primat de l’évangélisation», tandis que la J.E.C. et la J.A.C., mieux assises dans leurs milieux respectifs, poussaient leurs équipes et leurs militants à prendre des engagements politiques et syndicaux. Les aumôniers de la J.O.C. (des prêtres séculiers, plus timorés devant les idéologies modernes que leurs homologues des autres mouvements, pour la plupart des jésuites, progressivement éliminés d’ailleurs à la suite d’un Plaidoyer pour le clergé diocésain de Mgr Ancel) et la hiérarchie, notamment par la voix de Mgr Guerry, archevêque de Cambrai, s’efforcèrent alors de transformer en un débat théologique cette opposition entre deux méthodes d’action catholique, dont l’une voulait d’abord évangéliser, et l’autre agir dans la société par un engagement plus militant. L’épiscopat, en dépit des objections que le théologien Karl Rahner venait de faire à cette notion, argua du fait que l’Action catholique reposait sur un «mandat» pour trancher en faveur de la première orientation. En 1956, l’A.C.J.F., avec son président André Vial, prononça sa propre dissolution, et les évêques de France publièrent une charte ramenant l’Action catholique à une formule plus explicitement apostolique, c’est-à-dire plus soumise à leur autorité.Néanmoins, la J.E.C., surtout à propos de la réforme de l’université, du syndicalisme étudiant et de la guerre d’Algérie, et la J.A.C. (devenue le M.R.J.C., Mouvement rural de la jeunesse chrétienne) continuèrent d’apporter une attention privilégiée aux problèmes politiques et syndicaux, contribuant ainsi à former de très nombreux cadres de la vie publique française. Mais cette attitude, qui perpétuait les tensions avec les partisans de l’évangélisation et du «mandat», conduisit en 1965 à un nouveau conflit aigu, la «crise de la J.E.C.». De manière autoritaire, Mgr Veuillot, archevêque de Paris, força alors la branche universitaire du mouvement à se saborder. Les réflexions menées au sein de l’Office provisoire pour la recherche d’un apostolat étudiant, qui réunit alors tous ceux qui ne voulaient pas rompre avec la hiérarchie, aboutirent à la création en 1966 de la Mission étudiante, nouvelle instance aux objectifs recentrés sur une pastorale de témoignage et d’évangélisation. La J.E.C.-secondaire restait pour sa part implantée comme mouvement dans les lycées. Elle est réapparue au cours des années 1980 dans les universités.La crise des vocations sacerdocales et la déchristianisation massive de la société à partir de la fin des années 1960 vont complètement renouveler la question de l’apostolat des laïcs. Si les multiples formes prises par l’Action catholique requièrent toujours, en tant que services de l’Église, l’intervention de la hiérarchie, notamment pour l’authentification de ses missions, la désignation ou la cooptation de ses représentants ou encore la justification au regard de la doctrine de ses engagements dans le monde, il est devenu tout aussi évident que les laïcs partagent pleinement avec la hiérarchie le ministère apostolique de l’Église et qu’à ce titre ils ont un rôle propre à jouer. La théorie du «mandat», encore mentionnée par le décret conciliaire Apostolicam Actuositaten du 18 novembre 1965, s’est révélée inadaptée à cette nouvelle situation: dès 1975, les évêques de France rassemblés à Lourdes renonçaient implicitement à s’y réferer. Il semble qu’après le passage à vide des années 1970, l’Action catholique soit parvenue à se redonner une dynamique inspirée de l’ouverture généreuse au monde qui est au cœur du message délivré par le second concile du Vatican. L’expression de «corresponsabilité différenciée» forgée par Yves Congar, traduit bien cette exigence dans l’action de l’Église d’une «harmonie et d’une coopération apostolique des deux clergés, celui des religieux et celui des laïcs», selon la formule remarquable du décret déjà cité.Action catholiqueensemble de mouvements laïcs qui contribuent à l'apostolat de l'église catholique; la J.O.C. (fondée en 1924) est le plus ancien.
Encyclopédie Universelle. 2012.